Conférence de Laurence Moulinier, professeur d’histoire médiévale, université Lyon 2.
Connue de longue date pour ses visions, l’abbesse allemande Hildegarde de Bingen (1098-1179) a conquis ces dernières années un public de plus en plus large grâce à deux autres de ses dons. Cette bénédictine géniale, dont la longue vie fut particulièrement active, s’essaya en effet avec autant de succès à la musique et à la médecine, domaines dans lesquels peu de femmes ont laissé leur nom. Ses chants liturgiques (dont elle composa elle-même le texte et la musique) ont été conservés dans des manuscrits contemporains de leur auteur et sont abondamment joués et enregistrés. Sa médecine en revanche, si elle séduit un nombre toujours croissant d’adeptes en quête d’alternatives à la médecine traditionnelle, ne présente pas les mêmes garanties de fiabilité : les préceptes médicaux de Hildegarde, que le public redécouvre aujourd’hui avec enthousiasme, nous ont été transmis par des manuscrits tardifs, et donc susceptibles d’avoir subi bon nombre de modifications. Les écrits scientifiques qu’elle conçut et rédigea se confondent-ils réellement avec ceux qui nous sont parvenus ? L’édition qu’on en donna à la Renaissance à Strasbourg fut-elle établie d’après un manuscrit aujourd’hui disparu, ou est-elle une belle infidèle ? Et si l’étonnant savoir naturaliste de Hildegarde est bien le sien, d’où cette moniale prétendument inculte tenait-elle ces connaissances ? Autant de questions qu’on tâchera de présenter lors de cette conférence.
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