Handicaps et discriminations : des raisons d’agir !
Lycéen.ne.s, étudiant.e.s, militant.e.s associatifs, sociologues, artistes : tous et toutes engagé.e.s dans le partage de savoirs et d’expériences, pour agir sur le monde.
50 ans après la loi d’orientation en faveur des personnes handicapées », 20 ans après celle pour « l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées », et 8 mois après les jeux Paralympiques à Paris, le handicap est aujourd’hui le premier motif de discrimination en France, avant l’origine et l’état de santé.
Dans son rapport annuel du 17 avril 2023, le Défenseur des droits relève le manque d’accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH), les difficultés d’accès aux droits des prestations sociales liées au handicap et le fait que 60% des démarches administratives sont inaccessibles.
L’Observatoire des inégalités constate dans son “rapport 2023 sur les discriminations en France” que 20% des personnes en situation de handicap vivent sous le seuil de pauvreté contre 12.8% pour les personnes valides. Des discriminations à l’embauche des personnes en situation de handicap contribuent à les reléguer vers les métiers les moins qualifiés, et leur taux de chômage est presque deux fois supérieur à la moyenne nationale. Elles sont aussi davantage exposées à la violence, d’autant plus s’il s’agit de femmes. Même leur accès aux vacances est détérioré à la fois par manque d’argent mais aussi par l’inaccessibilité de nombre de structures.
Le 26 avril 2023, lors de la conférence nationale du handicap, le président de la République a posé dix engagements concernant l’école, l’université, l’accès à l’emploi, les droits du travail, l’accès à la santé et aux aides techniques, l’accessibilité des services et transports publics, et un égal accès au sport, à la culture et aux loisirs. En 2025, on est loin du compte, pour les handicaps mentaux, cognitifs et psychiques alors même qu’ils sont plus fréquents.
Le Festival Raisons d’Agir nous invite à penser le handicap sous l’angle de l’intersectionnalité, en lien avec d’autres discriminations, comme le sexe, l’âge, l’orientation sexuelle ou l’origine ethnique, qui se cumulent, et renforcent la vulnérabilité de personnes déjà fragilisées.
Contre l’approche médicale qui prédomine dans l’analyse du handicap, ces journées Raisons d’Agir invitent à penser le handicap sous un angle social, à travers les fonctionnements institutionnels qui contribuent à le produire, et au fil des processus qui façonnent la vie des individus : socialisation de genre, de classe et ethno-raciale, scolarisation, travail, loisirs, sport et vie amoureuse et sexuelle.
Ces questions sensibles seront abordées via le point de vue d’acteur.trice.s très différent.e.s, en associant au projet des personnes en situation de handicap et leurs associations, des professionnel.le.s du travail social, de l’éducation et de la santé, des réalisateur.trice.s documentaires, des professionnel.le.s de l’audio-description et de la traduction, des lycéen.ne.s et des étudiant.e.s, des associations de solidarité.
Le Festival Raisons d’Agir voudrait par là contribuer à une élaboration commune des raisons d’agir pour changer la condition des personnes en situation de handicap mais aussi tout simplement commencer à agir contre les discriminations.
Programme
Jeudi 10 avril
10h. De quoi parle-t-on lorsqu’on parle de handicap ? Une approche sociologique
Conférence inaugurale de Romuald Bodin, professeur, université de Nantes, Centre nantais de sociologie (CENS).
Animée par Louise Fromard et Bertrand Geay.
Qu’est-ce que le sociologue peut bien avoir à dire sur le handicap ? La cécité, le nanisme ou la paralysie d’un membre sont a priori des faits corporels et médicaux qui n’ont rien de social.
Pourtant, ce qui fait qu’une personne est considérée ou non comme handicapée relève plus du fonctionnement des institutions sociales (famille, école, travail, espace public, etc.).
13h30. Le handicap à l’épreuve du social : école, travail et ville
Travaux d’étudiantes et étudiants en première année “assistantes et assistants de service social” (ASS), IRTS de Poitiers.
Animé par Adélaïne Simonnet.
Photographies, podcasts et vidéos : ils et elles nous présentent le fruit de leurs recherches articulant le travail social et le handicap. Cette approche de terrain a construit leurs regards sur l’école et le travail en milieu dit “ordinaire” ou “spécialisé”, et sur l’accessibilité de la ville de Poitiers.
15h. Les tensions de l’école inclusive du point de vue des travailleurs et travailleuses de l’inclusion scolaire
Atelier avec Fabienne Montmasson-Michel, maîtresse de conférences en sociologie et Adélaïne Simonnet, doctorante en sociologie, université de Poitiers, GRESCO.
Animé par Guillaume Cuny.
Dans un contexte néolibéral, des tensions émergent entre le droit à une scolarisation, et de qualité, pour les enfants reconnus handicapés et les conditions de travail dégradées des professionnels de l’inclusion scolaire. Les ressources humaines et financières sont insuffisantes pour garantir une prise en charge adéquate, créant des difficultés tant pour les élèves et leurs parents que pour les enseignants et les AESH, ces derniers voyant leur travail empêché.
16h15. Comment adapter l’école ?
Table ronde avec Esther Baubeau, AVS-AESH depuis 2006, représentante syndicale et du personnel AESH et Marianne Seddoh, enseignante et parent, militante syndicale, et témoignages de parents et d’enfants.
Animée par Fabienne Montmasson-Michel et Adélaïne Simonnet.
La politique d’inclusion scolaire, avec l’arrivée en classe d’enfants en situation de handicap, et parfois de personnels pour les accompagner, interroge les pratiques enseignantes et le fonctionnement de l’école. Des témoignages pour nous questionner sur l’école, ses adaptations et les frontières entre milieux ordinaire et spécialisé.
18h. Pause
20h. Handicaps, corps et sexualités – Ciné-podcast-débat
Projection de On n’est pas des anges, documentaire de Michel Szempruch (39’), suivi d’extraits de Féminismes et handicaps : les corps indociles, podcast de Charlotte Bienaimé (crédits : ARTE Radio, Charlotte Bienaimé, Samuel Hirsch).
En s’appuyant sur ces productions, Pierre Brasseur, professeur de sociologie à l’université libre de Bruxelles, explorera l’intersection entre sexualité et handicap. Les documents présentés mettront en lumière les discriminations et l’invisibilisation des femmes en situation de handicap.
Vendredi 11 avril
10h. Idées reçues sur le handicap
Atelier avec Étienne Douat et Hugo Dupont, maîtres de conférences en sociologie, université de Poitiers, GRESCO, et Stéphane Vaquero, maître de conférences en sociologie, université de Limoges, GRESCO.
Animé par Pierig Humeau.
L’inclusion des personnes handicapées dans la société pose des questions générales comme celle de la lutte contre les inégalités et l’accès à une citoyenneté pleine et entière de tous et toutes sans discrimination. En s’attardant sur les croyances relatives au handicap (“le handicap ça se voit”, “le handicap peut toucher tout le monde”…), Étienne Douat, Stéphane Vaquero et Hugo Dupont tentent de dévoiler la place des personnes handicapées aujourd’hui dans notre société.
14h. Le travail et l’emploi : genre et handicap
Atelier avec Mathéa Boudinet, post-doctorante, CNAM.
Animé par Guillaume Cuny.
L’atelier présentera la situation des femmes et des hommes handicapé.e.s sur le marché de l’emploi et leurs conditions de travail. En croisant les analyses en termes d’inégalités de genre et de handicap, on reviendra sur les résultats principaux des sciences sociales portant sur les positions professionnelles des personnes handicapées : travail protégé, ségrégations horizontales et verticales, discriminations…
16h. Poitiers : une ville accessible ?
Plateau radio en direct avec Radio Pulsar et débat avec Jean-Jacques Latouille, référent accessibilité de l’Association des paralysés de France (APF) de Poitiers ; Vincent Caballero, référent accessibilité du Groupement pour l’insertion des personnes handicapées physiques (GIHP) Poitou-Charentes ; Alain Ribager, vice-président du GIHP Poitou-Charentes et Alexandra Duval, conseillère municipale déléguée à l’égalité des droits, Ville de Poitiers et vice-présidente aux solidarités et politique de la ville, communauté urbaine de Grand Poitiers.
Animé par Anaïs Greusard, journaliste à Radio Pulsar.
Quel bilan concret ? Quelle place des personnes concernées dans les prises de décision ? Quels freins aux aménagements urbains pour une meilleure accessibilité ?
À l’Hôtel fumé – Amphi Descartes
8 rue René Descartes à Poitiers
20h. L’œil du tigre
Expérience de cinéma en audiodescription
Avec Marie Gaumy, audio-descriptrice de l’association Les Yeux Dits, au Havre, autrice de l’audiodescription de ce documentaire de 78 mn de Raphaël Pfeiffer.
L’expérience proposée consiste en une diffusion du film entièrement en audiodescription. À son issue, échanges avec Marie Gaumy autour de son travail.
Laurence vit au cœur de la Mayenne avec son mari agriculteur et ses deux garçons. Son rêve, devenir championne de Viet Vo Dao, un art martial vietnamien. Mais ce n’est pas une mince affaire, surtout quand on n’a jamais fait de sport, qu’on aime faire la fête et qu’on a perdu la vue il y a plus de quinze ans.
Dans le cadre de la 19e édition du festival Raisons d’agir 2025, sur le thème Handicaps et discriminations.